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Quelques répliques de MatriX :

 

 

« - La matrice, c’est le monde qu’on superpose à ton regard pour t’empêcher de voir la vérité.

- Quelle vérité ?

- Tu es un esclave, Néo. Comme tous les autres, tu es né enchaîné. Le monde est une prison pour ton esprit »

 

 

« J’aimerais libérer ton esprit, mais je ne peux que te montrer la porte, c’est à toi qu’il appartient de la franchir. »

 

 

« Si tu veux savoir ce qu’est la matrice, tu devras l’explorer toi-même »

 

 

« La matrice est un système, et ce système est notre ennemi. Beaucoup de gens ne sont pas prêts à se laisser débrancher, ils sont si désespérément dépendants du système qu’ils sont prêts à se battre pour le défendre »

 

 

 

 

 

Année scolaire 2015 – 2016

Expérimentation d’une nouvelle approche du programme de Géographie

Niveau 5ème : Le développement durable.

 

 

En quoi le film MATRIX peut-il favoriser l’acquisition des notions du programme de géographie de 5ème, articulées autour du développement durable, et accessoirement du programme d’éducation civique axé sur l’égalité et la solidarité ?

 

Commençons par des considérations générales : l’obsession de notre système éducatif est d’apporter des réponses au problème de l’échec scolaire, et la principale justification de la réforme qui entrera en vigueur à la rentrée 2016 est précisément la lutte contre l’échec. Ses causes sont multiples, et remontent pour l’essentiel aux toutes premières années de scolarisation (apprentissage de la lecture selon des méthodes inadaptées, etc.). Les élèves qui sont en difficulté depuis l’école primaire sont démotivés, et cette démotivation entretient la spirale de l’échec. Comment y remédier ? Comment leur redonner envie de faire des efforts pour progresser ?

 

En les harcelant avec un discours du genre : « Faut que tu bosses, sinon tu n’auras pas de diplôme et sans diplôme, tu te retrouveras au chômage ou feras un métier pourri » ? Les élèves ne sont pas idiots : ils voient bien que la courbe du chômage ne s’inverse pas, ils savent que, diplômés ou non, ils auront les plus grandes difficultés à trouver leur place sur le marché du travail. La mondialisation a institué une concurrence déloyale entre les travailleurs du monde entier et il ne reste plus qu’à sacrifier nos acquis sociaux pour endiguer la délocalisation de nos usines. De quoi désespérer, sauf à trouver enviable le sort de l’ouvrier chinois ou pakistanais.

 

En mettant l’insertion sociale entre parenthèses pour insister sur la dimension civique ? L’éducation civique « classique » se réduit trop souvent à un prêchi-prêcha moralisateur où la notion de « bon citoyen » rejoint celle de l’enfant sage, qui ne dérange personne (et surtout pas l’ordre social établi) et « s’engage » pour limiter les dégâts occasionnés par la rétractation de l’Etat-providence : actions en faveur des restos du cœur, téléthons contre les maladies rares et autres « courses contre la faim » pour faire porter à la charité privée le fardeau de l’absence d’une véritable politique de développement. Pendant ce temps, nos surplus agricoles subventionnés continuent à inonder les marchés extérieurs, ruinant les paysanneries locales, et les laboratoires pharmaceutiques se frottent les mains car ils feront payer cher à la sécurité sociale les brevets sur les nouveaux médicaments découverts grâce au financement privé de la recherche.

 

Il serait illusoire de vouloir remédier à l’inondation de la salle de bains en passant la serpillière : il faut commencer par fermer le robinet. Autrement dit, il faut prendre le mal à la racine, et c’est là que MatriX vole à notre secours.

 

« La Matrice est un système, et ce système est notre ennemi ».

 

Que faudrait-il faire pour sauver le climat ? la biodiversité ? éradiquer la pauvreté et la famine ? Permettre à tous l’accès à une eau de bonne qualité et en quantité suffisante ? Réduire les risques technologiques ? Les inégalités sociales ? Rendre le développement durable ?

 

Tout est lié (c’est un système), et pour améliorer les choses, il faut agir à tous les niveaux à la fois. Les solutions existent, on peut les trouver facilement, mais pour les mettre en œuvre, c’est une autre histoire. Pourquoi est-ce si compliqué ? Parce-qu’on se heurte à des intérêts puissants, et parce-que nous n’avons pas le pouvoir tandis que ceux qui l’ont cèdent à la pression des lobbies. C’est là que l’enseignement de la géographie rejoint l’éducation civique : il faut aborder ces problèmes en citoyen mais le citoyen, dans une démocratie, c’est celui qui a le pouvoir, et le pouvoir, c’est la faculté de faire la loi. Tant que la loi sera faite par des élus (et tant que nous considèrerons l’élection comme l’alpha et l’oméga de la démocratie) elle sera à l’avantage des industriels et des banquiers qui financent les campagnes électorales, et le problème du développement durable restera inextricable. « Ce système est notre ennemi ».

 

Pour que la loi soit « l’expression de la volonté générale » comme l’indique l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, il faut que chacun puisse concourir personnellement à sa formation, et pas seulement par ses (pseudo-) représentants. Les élèves vont donc s’exercer à écrire eux-mêmes la loi : c’est le projet « CLé » (Collégiens – Législateurs).

 

Le citoyen, dans une démocratie, c’est celui qui a le pouvoir, et le pouvoir, c’est la faculté de faire la loi.

 

Et le rôle de MatriX est de leur en donner la motivation.

 

D’abord MatriX est une métaphore : le monde futuriste décrit par le film, où les « machines » réduisent l’humanité à la servitude, est le reflet du monde actuel (nous sommes esclaves du système). Mais la solution est aussi métaphorique : là où Néo s’entraîne aux arts martiaux pour être en mesure de porter des coups fatals aux « agents Smith », nos collégiens s’exerceront à écrire la loi dans le souci de promouvoir l’intérêt général, ce qui sera fatal aux lobbies qui défendent des intérêts particuliers.

 

La motivation découle de l’ambition que nous pouvons nourrir à leur égard et à la foi que nous plaçons en eux comme Morphéus en Néo : nous se voulons pas en faire seulement des « travailleurs employables » (et corvéables tous les jours de la semaine, dimanche inclus) ou de « bons citoyens » pleins de bons sentiments qui se dévouent à toutes les causes humanitaires, mais de vrais combattants, dignes héritiers de leurs ancêtres de 1789 ou des années 1940, des rebelles à ce système d’asservissement universel qui pourront s’identifier à la figure de Néo, « l’élu ». (en attendant la classe de 4ème où ils se retrouveront dans les grandes figures de la Révolution, ou dans les héros de la Résistance en classe de 3ème ). 

Et dans le film, Néo ne prend conscience que progressivement de sa « destinée », il doute de lui et il échoue (scène du saut après le programme d’entraînement aux arts martiaux : « la première fois, tout le monde tombe » : relativisation de l’échec, l’important est de s’accrocher, à la fin on réussit !). Mais en classe, « Néo » est collectif : c’est l’ensemble des élèves qui auront pour mission de sauver le monde… et ils travailleront ensemble (par petits groupes) pour y parvenir : on mettra l’accent sur la coopération plutôt que la concurrence (ce qui est aussi une manière de combattre le « système »).

 

Je fais donc le pari que ce qui favorise le plus la réussite des élèves, c’est de ne pas prêter une attention excessive à la réussite et de ne pas être obsédé par l’évaluation (sinon on focalise du même coup sur l’échec) mais de leur donner un horizon, un but à atteindre pour lequel ils devront développer leurs compétences scolaires, et de les armer de notre confiance en eux !

 

Il ne me restera plus qu’à faire le bilan de cette expérimentation au mois de juin 2016…

 

 

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